Nathalie Arthaud répond à notre lettre ouverte envoyée à l’ensemble des présidentiables. Vous pouvez retrouver cette lettre ici : Lettre ouverte
Voici sa réponse sans aucune modification. Un simple copier-coller du mail.
Le système de santé dans son ensemble se détériore dans tout le pays depuis des années, avec de graves conséquences pour les professionnels de santé comme pour les patients et les nombreuses personnes conduites à renoncer aux soins dont elles auraient besoin.
Après des décennies de dégâts d'une politique incarnée par le numerus clausus, le problème des déserts médicaux et de la couverture médicale en général a atteint un niveau dramatique. Même les dernières publications du Ministère de la santé indiquent que la situation continue de s'aggraver, comme on le voit lorsqu'on rapporte l'évolution de la densité en médecin à celle de la consommation de soins de la population (Dossier de la DREES de mars 2021 sur la démographie des professions médicales).
En dépit du remplacement du « numerus clausus » par le « numerus apertus », on reste très loin du compte. Le nombre d'étudiants entrant en études de médecine n'est qu'à peine supérieur à ce qu'il était dans les années 1970 alors que la population est nettement plus nombreuse et que les besoins de soin ont augmenté avec son vieillissement. Par ailleurs, plus de la moitié des 114 500 médecins actifs aujourd'hui ont plus de 50 ans : ce n'est pas avec quelques milliers d'étudiants en plus chaque année que la situation pourra être rétablie.
Les nouvelles modalités de fixation du « numerus apertus », supposément défini en fonction des besoins de soins locaux, ne font pas disparaître la nécessité que les moyens alloués à la formation doivent suivre. Or ceux-ci sont soumis aux restrictions budgétaires gouvernementales. Pour les médecins comme pour les infirmiers, ce ne sont pas les candidats qui manquent, mais les moyens de les former et les infrastructures nécessaires à ce qu'ils puissent ensuite travailler dans de bonnes conditions.
Pour les médecins comme pour les pharmaciens qui font des études et apprennent leur métier grâce à l’argent public dans des facultés et des hôpitaux, il faut réfléchir à un système permettant l’installation de médecins et de pharmaciens en fonction des besoins réels des populations et pas sur le simple critère du profit personnel en s’installant dans des départements favorisés, quitte à les aider pour leur installation.
Vous écrivez qu'il existe des mesures budgétairement neutres pour remédier aux déserts médicaux et renforcer l'accès aux soins. Je ne me pose pas la question de cette façon. J’affirme qu’il est indispensable de répondre aux besoins « quoi qu’il en coûte » donc en augmentant les dépenses consacrées à la santé de la population dés que c’est nécessaire. Évidemment, un meilleur accès aux soins et une meilleure prévention peuvent permettre de limiter la gravité et l'apparition des problèmes de santé. Mais aujourd’hui c’est l’inverse qui se produit et cela devient dramatique. Il faut donc des mesures d’urgence. Parmi elles, il faut imposer la réouverture des établissements de santé de proximité qui ont été fermés : maternités, cliniques, centres de santé…
IL faut également mettre en œuvre des plans d’embauches massives de professionnels destinés à promouvoir l'éducation à la santé. Il faut embaucher à l’école, dans les universités, les services publics et les entreprises, autant de lieux qui sont devenus eux aussi au fil des années de véritables déserts médicaux et infirmiers.
Cela a un coût ? Oui, bien sûr, mais qu’on ne nous dise pas qu’il n’y a pas d’argent dans la société ! Durant le confinement, l’État a garanti les affaires des capitalistes à coups de dizaines de milliards. Il s’est substitué au grand patronat en payant le chômage partiel à 12 millions de salariés. Et il continue de le faire, avec ses plans de relance se chiffrant en milliards.
Et surtout, au-delà de l’argent public, il y a tous les profits accumulés pendant des années par tous ces grands groupes. Durant l’année 2021, les seules entreprises du CAC 40 ont réalisé 137 milliards d’euros de profits. Soit l’équivalent de 2,3 millions d’emplois payés 2 000 euros, cotisations incluses.
Ces richesses, toutes créées par l’activité des travailleurs, sont détournées au profit des actionnaires et alimentent la fortune de quelques milliardaires. Dans cette période de crise où les conditions d’existence de millions de femmes et d’hommes sont menacées, les capitaux accumulés par les plus fortunés au cours de cette période rendent possible la réalisation d'une politique de santé publique digne de ce nom... à condition de faire passer la santé de la population avant les intérêts financiers d'une petite minorité.
Cordialement, Nathalie Arthaud