Nicolas Dupont-Aignan répond à notre lettre ouverte envoyée à l’ensemble des présidentiables. Vous pouvez retrouver cette lettre ici : Lettre ouverte
Voici sa réponse sans aucune modification. Un simple copier-coller du mail.
Monsieur le Président,
J'ai bien pris connaissance de votre lettre ouverte aux candidats à l'élection présidentielle,
par laquelle vous appelez notre attention sur l'inquiétante situation des déserts médicaux.
Fort de mon expérience de Maire pendant 22 ans, je connais les difficultés que rencontrent de plus en plus de nos territoires dans l'accès à une offre de soin de qualité et, force est hélas de constater que la désertification médicale n'est plus l'apanage des territoires ruraux, puisque même les régions les plus urbanisées sont désormais concernées !
En 2020, la crise sanitaire majeure causée par la pandémie de Covid-19 a tragiquement mis en évidence les graves faiblesses dans lesquelles vingt ans de travail de sape budgétaire ont plongé nos hôpitaux publics, tandis que la médecine de ville et les cliniques se trouvaient progressivement asphyxiées par les contraintes administratives et un pilotage défaillant.
La France, jadis légitimement fière de son système de santé, le voit aujourd’hui menacé de déclassement par l’accumulation des décisions court-termistes prises au cours des vingt dernières années.
Je suis convaincu que ce système doit être préservé car le caractère solidaire du système de santé est un ciment pour la société française, permettant l’accès aux soins de tous les citoyens, « de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins » selon la maxime des fondateurs de la Sécurité sociale.
Alors que la France est un des pays qui dépense le plus pour sa santé (11,3% du PIB en 2019), elle est confrontée à une pénurie de professionnels de santé et à un engorgement de l’hôpital public. La France comptait 226 000 médecins en activité au premier janvier 2018. Si la densité médicale pour 100 000 habitants se situe en France, selon « le Panorama de la Santé » publié par l’OCDE en 2019, dans la moyenne européenne, le nombre de médecins réellement impliqués dans les soins est moindre que la moyenne européenne. Certaines spécialités, comme la gynécologie où le nombre de praticiens en activité a baissé de 40% en dix ans, sont particulièrement sinistrées. Mais surtout les disparités géographiques sont devenues inacceptables. Entre les cœurs des grandes villes et la France des territoires, la densité
médicale varie de 4 à 1, aussi bien en secteur public que libéral.
Aujourd’hui, 47 % des médecins ont 55 ans ou plus (alors que c’est le cas de 18 % des cadres et professions intellectuelles supérieures) et 30 % ont 60 ans ou plus. Ce vieillissement est le résultat de mesures prises par nos gouvernements successifs de baisser le numérus clausus des médecins entre 1977 (8 700) et 1997 (3 600). Cette vision complètement simpliste et irréaliste dont le leitmotiv est « moins de praticiens engendrera moins de consultations,
donc une diminution des coûts », est responsable en grande partie de la situation inquiétante dans laquelle le système de santé français se trouve aujourd’hui.
Si le numerus clausus a doublé entre 1997 et 2007 et atteignait 9 361 en 2020, le retard lié aux « classes creuses » occasionnées par un numerus clausus beaucoup trop bas dans les années 1980 et 1990 n’a pas encore été comblé. Ainsi, les effectifs de certaines professions de santé demeurent inquiétants, le nombre de médecins généralistes stagne depuis 2012 alors même qu’ils ne sont pas assez nombreux pour répondre à la demande de soins dans de nombreux territoires. Il en est de même pour nombre de secteurs, où dans certaines régions les délais de prise en charge sont de plusieurs mois, sans parler des difficultés rencontrées par l'Hôpital public et privé, la médecine de ville…
Et la venue de médecins ayant obtenu leur diplôme à l’étranger n’est hélas pas de nature à compenser le développement de déserts médicaux. En effet, le nombre de médecins titulaires d’un diplôme obtenu hors de France augmente depuis 2007 pour atteindre en 2017 22 500 praticiens. Parmi les 8 600 nouveaux médecins inscrits au Conseil national de l’Ordre national des médecins au cours de l’année 2017, 15% étaient titulaires d’un diplôme étranger. Il s’agit pour 1/3 de diplômes du Maghreb et pour 18% de diplômes roumains. Toutefois ces médecins ne peuvent pas aujourd’hui pallier le manque d’effectifs car ils privilégient massivement l’exercice salarié (62%) ou mixte (13%). Seul ¼ d’entre eux exerce en secteur libéral exclusif. Par ailleurs, ces médecins privilégient les territoires à forte densité et ne constituent pas réellement une réponse à la désertification.
C'est pourquoi mes propositions visent à améliorer l’offre et la qualité des soins de proximité sur l’ensemble du territoire, à l’hôpital comme pour la médecine de ville, garantir l’égalité des Français devant la santé dans des conditions de financement public maîtrisées, améliorer les conditions de travail des professionnels et partir à la chasse aux dépenses inutiles et aux gaspillages.
Aussi, ai-je proposé dans mon programme présidentiel plusieurs mesures à même de répondre aux défis auxquels nous sommes confrontés, tant à court et moyen terme qu'à plus longue échéance, notamment :
• suppression immédiate, intégrale et irréversible du passe sanitaire et vaccinal responsables de la mise à l'écart de plusieurs milliers de professionnels de santé indispensables à une bonne couverture médicale de notre territoire.
• création, afin de mettre fin aux déserts médicaux, d'une bourse pour les étudiants en médecine en échange de laquelle ils s’engageront à s’installer dans une zone sous dotée pendant leurs 5 premières années et permettre aux médecins s’établissant dans les déserts médicaux de toucher plus de revenus en complétant les dispositifs existants (via des diminutions de cotisations d'Urssaf).
• organisation et systématisation des consultations avancées de généralistes et spécialistes venant des zones bien dotées vers des zones sous-médicalisées, par exemple une fois par semaine, avec frais de fonctionnement et transport, pris en charge. Les conséquences seraient positives : économie de frais d’ambulance (3Mds € par an), maintien d’un haut niveau de compétences, moins d’allers et retours lointains pour les patients. En parallèle, développer le système de camions mobiles de santé.
• implantation des maisons de santé afin de s’assurer qu’elles couvrent correctement le territoire, notamment via la simplification des normes des procédures des ARS, en coordination avec les communes.
• augmentation du nombre de places dans les études de médecine afin d'atteindre 12 000 praticiens par an afin de retrouver à moyen terme un nombre de médecins diplômés en France suffisants sur l’ensemble du territoire.
• Accroissement de la prise en compte de la pénibilité du travail du personnel hospitalier (infirmières, aides-soignantes, brancardiers…) par la création de primes spécifiques.
• refus du choix du gouvernement de privilégier la prise en charge des patients par des structures excluant les libéraux et ne respectant pas le libre choix du patient de son praticien (SSIAD, HAD).
• fin de la tarification à l'acte de soins pour les établissements de santé en mettant en place un financement reposant sur un panier de critères objectifs.
• arrêt immédiat des fermetures de lits (plus de 100 000 lits supprimés entre 1997 et aujourd’hui), rouvrir un établissement de santé (hôpital, maternité…) par département à l'image du Val-de-Grâce en Ile-de-France et cesser les concentrations d’établissements santé (NB : rouvrir une maternité par département nous ramènerait au niveau
de 2008).
• doublement du nombre de lits de réanimation (pour atteindre 10 000) en cinq ans avec les personnels qualifiés pour égaler l'Allemagne (coût de 2,5 Mds€ par an, contre 20 Mds€ de coût des fraudes à la carte vitale)…
S'il m'est difficile, dans un courrier, d'être exhaustif, je vous invite toutefois à consulter l'intégralité de mon projet santé disponible sur www.2022nda.fr, ainsi que le chiffrage (disponible en cliquant ICI) de ce projet, soucieux que je suis de gérer les finances nationales en « bon père de famille ».
Souhaitant avoir répondu à vos interrogations et dans l'attente de l'événement du 8 mars auquel participera en mon nom le Docteur Véronique Rogez, je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.
Nicolas DUPONT-AIGNAN